Autrefois omniprésents dans les foyers, les matelas en paille tendent aujourd’hui à disparaître, remplacés progressivement par des matelas importés d’Europe. Ce déclin menace un savoir-faire artisanal transmis de génération en génération. Malgré les défis, certains artisans continuent de fabriquer ces matelas traditionnels, s’adaptant aux réalités du marché et aux contraintes d’approvisionnement.
Les artisans qui fabriquent ces matelas en paille utilisent des matériaux simples mais indispensables à leur activité.
« Nous utilisons des aiguilles et du fil vendus sur le marché, ainsi que des sacs de riz vides et parfois du tissu. Certains matelas sont faits avec un mélange de tissu et de sacs, d’autres uniquement avec des sacs. Nous ajoutons du tissu pour embellir le matelas et empêcher le glissement du drap », explique Thierno Mamadou Camara, l’un des fabricants de ces matelas.
Si ces matelas sont encore prisés par une certaine clientèle, leur fabrication reste laborieuse et demande un savoir-faire précis. Il ne s’agit pas seulement d’entasser de la paille dans un sac, mais de la disposer de manière homogène pour garantir un bon confort et une durabilité.
Comme dans de nombreux secteurs artisanaux, la vente de matelas en paille connaît des périodes de forte demande.
« Notre meilleure période, c’est la rentrée scolaire. Chaque année, des élèves qui doivent déménager achètent ces matelas. Même s’ils n’ont pas toujours les moyens de payer le prix exact, nous faisons des réductions, car nous comprenons leur situation. Nous aussi, nous avons des enfants à scolariser », précise maître Thierno Mamadou.
Quant aux prix, ils varient en fonction de la taille et de la qualité des matelas.
« Nous fabriquons des matelas de 4 places, 3 places, 2 places et 1 place. Nous vendons le 4 places entre 140 000 et 150 000 francs, et le 3 places entre 100 000 et 110 000 francs », détaille-t-il.
La fabrication de ces matelas repose sur une matière première essentielle : la paille. Or, son approvisionnement devient de plus en plus difficile, notamment à certaines périodes de l’année à cause de la destruction de l’environnement.
« Nous sommes souvent confrontés à des problèmes, surtout pendant la saison des pluies, car il est difficile de trouver de la paille. Au début de la saison sèche, les gens mettent le feu aux herbes, ce qui réduit nos sources d’approvisionnement. Actuellement, certains de nos collègues sont partis en brousse chercher de la paille et y resteront deux à trois jours. Une fois récoltée, la paille est mise en sacs et transportée jusqu’ici à l’aide de motos-taxis à quatre pneus ou de camions revenant avec des chargements de cailloux. C’est un travail éprouvant », explique maître Alpha Oumar.
Mamadou Aliou Dramé, commerçant de matelas en paille, achète directement auprès des fabricants avant de les revendre sur le marché local.
« Je me rends sur les lieux de fabrication et nous discutons des prix. Lorsque nous trouvons un accord, j’achète les matelas. En général, ils sont compréhensifs et baissent les prix, sauf pendant la saison des pluies, où la rareté de la paille entraîne une hausse des coûts », confie Monsieur Dramé.
Il souligne également les avantages des matelas en paille par rapport aux matelas importés ou modernes.
« Si tu dors sur un matelas importé, tu auras du mal à te lever tôt. Mais avec un matelas en paille, tu te réveilles plus facilement. Ces matelas sont bons pour la santé, contrairement aux matelas importés qui provoquent de la fatigue. C’est pour cela que certains clients préfèrent acheter ces matelas, en différentes tailles, d’une place à 4 places», précise-t-il.
Malgré la concurrence des matelas importés, la demande pour les matelas en paille reste relativement stable.
« Si nous recevons dix matelas, nous pouvons en vendre six par jour, parfois cinq ou trois. Aujourd’hui même, j’ai vendu deux matelas », indique Mamadou Aliou Dramé.
Mais jusqu’à quand ce commerce pourra-t-il survivre face à l’évolution des modes et aux difficultés d’approvisionnement ? Même si les artisans de Labé s’accrochent encore à ce métier traditionnel, l’avenir des matelas en paille demeure cependant incertain.
Aissatou Maleya Diallo pour foutakameen.com
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