Créée le 25 mai 1963 sous le nom d’Organisation de l’unité africaine (OUA), l’actuelle Union africaine (UA), rebaptisée ainsi en 2000, a célébré dimanche dernier ses 62 ans d’existence. Dans un contexte de conflits, d’instabilité politique et de défiance de la jeunesse, quel rôle cette institution joue-t-elle aujourd’hui dans le développement du continent ? Elhadj Ibrahima Sampiring Diallo, professeur à la retraite et ancien maire de la commune urbaine de Labé, également témoin de la création et de l’évolution de cette institution continentale revient dans ce long entretien qu’il a bien voulu accordé à la rédaction de foutakameen.com sur l’histoire et les enjeux de l’Union Africaine (UA).
L’esprit fondateur de l’OUA
Selon le doyen Sampiring, la création de l’OUA a été motivée par la volonté des dirigeants africains nouvellement indépendants de s’unir face aux défis communs.
« Le 25 mai 1963, les pays africains récemment libérés du joug colonial se sont réunis à Addis-Abeba, en Éthiopie, pour parler d’une seule voix et œuvrer ensemble à la résolution des problèmes du continent. C’est sur cette base de solidarité que l’OUA a été fondée », explique-t-il.
Pourquoi un changement de nom ?
Le passage de l’OUA à l’UA en 2000 marque selon lui une volonté de réforme.
« Les Africains ont compris que l’organisation ne fonctionnait pas comme ils l’espéraient. Le changement de nom s’est accompagné d’un réajustement du fonctionnement : l’UA a remplacé le secrétaire général par un président et mis l’accent sur l’intégration régionale et la libre circulation », précise Elhadj Ibrahima Diallo.
Une institution encore dépendante ?
Interrogé sur le fonctionnement de l’UA, il pointe du doigt la dépendance économique comme principal frein à son efficacité :
« Il existe plusieurs commissions, comme celles des droits de l’homme ou de la paix, mais leur fonctionnement est entravé par le manque de contribution de certains pays membres. L’UA est contrainte de faire appel aux financements occidentaux, souvent assortis de conditions. Cela limite sa capacité à défendre fermement les intérêts africains », estime-t-il.
Quelles solutions pour renforcer l’UA ?
Pour rompre avec cette dépendance, M. Diallo recommande une implication sincère et collective des États membres.
« Il faut que les dirigeants travaillent pour leurs peuples, non pour eux-mêmes. L’Union doit aussi former des diplomates compétents capables de défendre l’Afrique à l’échelle internationale, comme à l’ONU ou à l’Union européenne. Il faut aussi appuyer les organisations sous-régionales, comme la CEDEAO, dans la promotion de la démocratie et de l’intégration», préconise notre interlocuteur.
Les conflits armés
Concernant la gestion des conflits, il estime que la paix ne dépend pas uniquement de l’UA.
« C’est l’affaire de tous les Africains. Ceux qui provoquent les crises sont souvent liés à des groupes armés ou à des puissances étrangères. Regardez le Sahel : ces puissances ne viennent pas pour nous aider gratuitement. Il est temps que les Africains innovent, investissent dans la recherche, et soient capables de se défendre eux-mêmes».
Le rôle de la Guinée auprès de l’Union Africaine
La Guinée, selon lui, a toujours joué un rôle majeur au sein de l’UA :
« Le premier secrétaire général de l’OUA, Diallo Telly, était Guinéen. En 2016, Alpha Condé a présidé l’Union africaine. Et bien avant, Sékou Touré a été l’un des grands défenseurs de cette organisation», fait-il savoir.
Un appel à l’unité et à la jeunesse
En conclusion, Elhadj Ibrahima Sampiring Diallo lance un appel aux dirigeants africains :
« Il est temps de dépasser les clivages régionaux et de penser au bien commun. L’Afrique attend beaucoup de cette institution. »
Il exhorte aussi la jeunesse à se former, à innover et à s’engager sérieusement : « C’est par le travail et la recherche scientifique que les jeunes Africains pourront relever leur continent », a conclu Elhadj Ibrahima Sampiring Diallo, professeur à la retraite.
Abdourahmane Baldé pour foutakameen.com
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